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INTERVIEW AGENCE : SECTEUR
FORMATION ET EDUCATION

Portrait de Brigitte Fournier
Qui ? Brigitte Fournier
Fondatrice de l'agence Noir Sur Blanc

Sujet ? La communication dans le secteur de l'enseignement, de la formation et du marché du recrutement

 
Bonjour Brigitte Fournier, pouvez-vous vous présenter ainsi que l'agence Noir sur Blanc ?

J’ai créé l’agence Noir sur Blanc en 1990. Il s’agissait de la première agence de communication spécialisée dans le secteur de l’Education et de la recherche. Face aux besoins du marché, nous nous sommes rapidement internationalisés, puis nous avons élargi notre offre afin de répondre à toutes les problématiques de communication de nos clients et de les accompagner au mieux dans leurs besoins. Aujourd’hui, Noir sur Blanc est l’agence de communication globale leader sur le secteur de l’éducation et de la recherche. Elle s’adresse aux écoles et universités, aux institutions et pouvoirs publics, mais également aux entreprises. Car au-delà des universités, écoles, et pouvoirs publics, qui sont les publics types du secteur, l’agence accompagne également toutes les marques employeur qui souhaitent communiquer auprès des étudiants et/ou jeunes diplômés. Attirer l’attention de ce public et avoir une bonne image auprès d’eux sont des enjeux extrêmement forts pour l’avenir des entreprises. Notamment parce que les recrutements déterminent l’avenir d’une entreprise et font sa différence.

Nous proposons un accompagnement à 360° en élaborant des stratégies qui se déclinent de manière cohérente sur l’ensemble des outils de communication. Ainsi, après une phase d’observation, d’audit et d’analyse, nos équipes élaborent une stratégie de marque en accord avec les objectifs du client et son environnement concurrentiel. A partir de ces éléments, les équipes créatives imaginent des concepts transversaux qui seront déclinés et adaptés à travers tous les outils de communication, assurant ainsi la cohérence et la préservation de l’image et des valeurs de la marque.
 

Quelle est la spécificité de la communication dans le secteur de l'enseignement, de la formation et du marché du recrutement ?

Pour les trois, il s’agit de secteurs qui recoupent beaucoup d’enjeux politiques, économiques et sociétaux. Si on se penche sur la France et plus largement l’Europe, le secteur de l’enseignement supérieur s’est ouvert tardivement à la communication. C’est en parti dû au fait que le financement de l’enseignement supérieur français a longtemps été soutenu par l’Etat. Mais peu à peu, l’environnement a muté, et les écoles privées ont transformé le marché. Les institutions sont devenues de plus en plus nombreuses, les subventions de l’Etat de moins en moins présentes, et la concurrence, a fortiori, plus rude. Il a donc fallu communiquer pour montrer sa différence et ses atouts. Mais les institutions de l’enseignement supérieur français n’étaient pas forcément prêtes en interne à intégrer cette nouvelle donne. En 1990, quand Noir sur Blanc est né, il y a eu un gros travail pédagogique à faire auprès de ces institutions, afin de leur démonter l’importance de la communication.

Aujourd’hui, le secteur a fait beaucoup de progrès. Toutefois, la communication reste un travail délicat et complexe, notamment parce que les publics sont à la fois nombreux et très différents dans leur profil. Pour communiquer efficacement auprès de chacun, il faut personnaliser les messages et les supports, tout en conservant une cohérence globale, ses valeurs, son histoire, etc. On est passé d’une communication unilatérale à une communication avec feedback, ce qui a évidemment entrainé une segmentation des publics, et donc une plus grande complexité dans la mise en place de stratégies de communication efficaces. À cela s’ajoute un autre challenge, celui de la communication à l’international. Car les secteurs de l’éducation et de la formation ne se pensent plus à l’échelle nationale. Désormais, une institution qui a des ambitions doit être visible à l’international pour attirer des étudiants étrangers.

D’autre part, les écoles et universités offrent des « produits » ou « services » particuliers. Acheter une bouteille de soda ne demande pas le même engagement que de s’inscrire à un cursus en master par exemple. Au-delà du prix qui peut être très conséquent, il s’agit d’un choix et d’un investissement personnel qui déterminent votre carrière, et même votre vie. Cependant, on voit à quel point le potentiel de communication et de capital de marque est énorme. Prenez certaines grandes universités américaines : le lien qui lie les étudiants (actuels ou anciens) à leur université est très fort. Chacun devient un ambassadeur de la marque, et la communauté est extrêmement large et soudée.

Pour les marques employeurs qui souhaitent communiquer auprès des étudiants, les enjeux sont également forts. Il y a beaucoup de concurrence pour recruter les meilleurs éléments et les fidéliser. Si on regarde les entreprises n° 1 et n°2 sur un même secteur, on s’aperçoit que la différence se fait dans les éléments recrutés. Il s’agit d’un point crucial pour les entreprises, même sur un marché où le recrutement est morose.
 

La présence en ligne des écoles et universités est-elle satisfaisante aujourd'hui ?

Il y a eu pas mal d’améliorations ces dernières années. Les écoles ont conscience de l’importance de communiquer auprès de leurs publics, et de créer un lien avec eux. Ils ont travaillé sur leur site internet et investi les réseaux sociaux (avec plus ou moins de réussite) et les services de communication en interne se sont étoffés sur ce point.

Mais il y a encore du chemin à faire selon moi. Les nouveaux outils de communication ont été investis, certes, mais pas toujours de la bonne manière. Il ne suffit pas de communiquer sur les réseaux sociaux par exemple. Il faut bien communiquer : c’est-à-dire délivrer le bon message à la bonne personne, tout en proposant de l’information susceptible de l’intéresser, et si possible en la délivrant de manière originale et ludique. C’est un travail de fond, qui demande pas mal d’investissement et de la constance. C’est à ce prix qu’on capte les publics et qu’on les fidélise dans le temps.

Quels sont les principaux objectifs pour une école, en ligne ? Développer de la notoriété ? L'image ? La réputation ?

Ça peut être les 3. Ces objectifs dépendent des axes stratégiques, de l’état des lieux qu’une institution fait d’elle-même et des publics vers lesquels elle souhaite communiquer.

Dans tous les cas, il faut veiller à ne pas considérer internet comme un support de communication, au même titre que le papier par exemple. Il s’agit d’un écosystème complexe dans lequel les publics à qui on s’adresse interagissent avec les institutions/marques/entreprises. Et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’internet, et plus particulièrement le web 2.0, a entièrement révolutionné les métiers de la communication. Chez Noir sur Blanc par exemple, nous avons fait évoluer nos relations presse en ce sens. Nos consultants sont polyvalents : ils possèdent des compétences de concepteur-rédacteurs, ils twittent et réalisent de mini reportages vidéos à poster sur les réseaux sociaux, etc.

Auparavant, les institutions de l’enseignement supérieur en France pensaient souvent la communication comme un ensemble de prestations annexes à la stratégie globale de l’entreprise. Ça ne faisait pas partie des priorités et n’était que très rarement rattaché à la direction. Avec l’arrivée du web 2.0, les rapports de force se sont inversés entre marques et consommateurs. Le web est un espace de liberté et d’expression pour tous, avec une caisse de résonnance incroyable. Les institutions ne peuvent plus ignorées cela, sous peine de connaitre d’énormes déconvenues. Par la force des choses, la communication est devenue un point particulièrement stratégique pour les institutions. Elles sont désormais obligées d’élaborer des stratégies de communication cohérentes et transparentes.

Est-ce que le marketing de contenu fonctionne bien pour les écoles et universités ?

Plus que jamais. Le web 2.0 et notamment les réseaux sociaux ont offert un formidable terrain de jeu au brand content.

Comme je le disais, une école ou une université propose des offres et services à très fort engagement. Adhérer à ce type d’institution est donc un signe fort. Et dans cette logique, il est important que la marque produise un contenu qui réponde aux intérêts de ses publics. Ce contenu, s’il est bien pensé, ne sert pas forcément à vendre mais surtout à rallier une communauté à votre marque. Car ces gens se sentiront proches de votre ton, de vos valeurs, de votre style, etc. Cependant, en France, les institutions du secteur n’y sont pas encore vraiment parvenues.

Enfin, en ce qui concerne les marques employeurs et le recrutement, tout reste à faire sur ce plan. Peu d’entreprises possèdent et/ou savent gérer une vraie communication de marque employeur qui soit individuelle, personnelle et différenciante par le contenu qu’elle propose.
 

Les écoles reçoivent-elles beaucoup d'attention de la part des médias ?

Les journaux français sont assez peu intéressés par le sujet de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il y a peu de rubriques régulières. Ce sont des sujets dont l’impact et les enjeux se conçoivent sur le long terme et, très souvent, peu de médias comprennent et évaluent l’importance de ces sujets sur la société et notre politique. Ils évaluent aussi mal le ROI que cela peut leur apporter : budget publicité, fidélisation d’un lectorat jeune …..Ils ont du mal à replacer ce sujet sur un plan stratégique, économique, sociétale et géopolitique. A l’inverse, prenez l’Angleterre, vous verrez que de grands titres de presse comme le Financial Times ont pleinement intégrés ces sujets dans leur contenu. Ils ont même développé ces rubriques et en font un fer de lance de leur stratégie et de leurs revenus.

Chez Noir sur Blanc, nous avons choisi de développer une autre dimension de ces sujets avec la presse. Très en amont des tendances grâce à nos clients anglo-saxons qui représentent de grandes marques , nous travaillons sur le story telling et le brand contents, et depuis 15 ans à placer leur marque non pas dans les rubriques éducations, mais dans les autres rubriques telles que l’économie, la société, etc. Ainsi, on booste la notoriété de la marque et la réelle valeur ajoutée d’une institution et de ses programmes grâce à des rubriques plus « grand public », en mettant en avant une image d’une autre envergure pour les DG des Ecoles et des enseignants chercheurs positionnés comme des experts.

Quelles métriques vous semblent les plus judicieuses pour évaluer l'impact de cette communication ?

Tout dépend des outils de communication utilisés. Noir sur Blanc a un client en Afrique du Sud qui ne parvenait pas à recruter des étudiants indiens. Nous avons donc élaboré une campagne de presse à l’intention de ce public. Et 12 mois plus tard, le client recrutait des étudiants indiens. Evidemment, dans ce cas précis, l’objectif à atteindre est facilement vérifiable et quantifiable.

Typiquement, la question du ROI n’est pas traitée de la même manière selon les pays. Chez Noir sur Blanc, nous avons remarqué que la plupart de nos clients français ne nous font pas de retours chiffrés et concrets sur l’impact de nos stratégies et des actions mises en place. A l’inverse, pour la plupart de nos clients anglo-saxons, c’est un réflexe.

Plus globalement, évaluer l’impact d’une action de communication nécessite de mettre en place des indicateurs et des critères multiples en interne. Ca demande une mise à jour des données constante et honnête, et ce aussi bien du côté de l’agence que du client. Par exemple, après une campagne de publicité, on devrait systématiquement interroger les étudiants entrants sur leur mécanique de choix de l’institution. Comment ont-ils entendu parler de l’école ? Telle publicité a-t-elle attiré leur attention ? Etc. Mettre en place ce type d’action systématique doit faire l’objet d’une méthodologie commune entre l’agence et son client.